La résolution 377 des Nations Unies en dernier recours ?

La fuite en avant criminelle du régime Netanyahou a visiblement pour objectif d’accélérer et de terminer le nettoyage ethnique dans la bande de Gaza pour mettre le monde devant le fait accompli. Nous assistons pourtant ces derniers jours, à un basculement qui pourrait devenir une lame de fond contre le génocide à Gaza. Le reconnaissance par une commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme de l’ONU qu’Israel commet quatre des cinq catégories de crimes qui définissent le génocide peut être un facteur fondamental de ce retournement de situation, puisque selon les termes de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, les Etats ont obligation à appliquer un certain nombre de mesures coercitives.

Est-ce qu’ils auront le courage d’obéir aux lois qu’ils se sont eux-mêmes données ? Ce qui est certain, c’est qu’il est tard, très tard et que les secondes avant que ne retentisse le bruit du gong sont celles qui séparent l’humanité du chaos.

Soyons clairs, pour des raisons idéologiques (ou pathologiques) certains aspirent à ce chaos, notamment, et ce n’est pas l’une des moindres raisons, parce qu’il est beaucoup plus « simple » d’assoir son autorité par la terreur et le chaos que par l’aspiration à servir l’humanité. Le chaos a toujours été le recours des hommes de peu de caractère ou des fous messianiques opérant dans l’ombre, comme des régimes faibles et despotiques.

Si Netanyahou parvient à ses fins à Gaza et en Cisjordanie, alors les crimes odieux qu’il a commis se reproduiront inéluctablement, et ici ou ailleurs, maintenant ou dans quelque temps, tout simplement parce que le monde aura accepté l’inacceptable, parce que l’humanité aura vendu son âme au diable. Un très mauvais « deal » qui se paye toujours argent comptant.

La déclaration de l’Institut Schiller, que je poste ci-dessous, sur la nécessité de se battre pour l’application de la Résolution 377 (V) des Nations Unies appartient aux actions pour reprendre le flambeau de l’humanité et, surtout, pour créer les conditions immédiates de l’arrêt d’un des pires crimes de toute l’histoire humaine et, ce faisant, pour arrêter notre propre décheance en tant qu’être humain et en tant que société.

L’ONU fête en 2025 le 80ème anniversaire de sa naissance. Rappelons qu’elle a été fondée en 1945, au lendemain de la victoire contre le nazisme, sur les ruines encore fumantes et les dépouilles des millions de morts provoqués par la guerre, avec pour objectif le maintien de la paix et de la sécurité. Si elle était fidèle à sa raison d’être, elle aurait depuis longtemps trouvé le moyen d’agir contre le génocide en cours à Gaza. Tel n’est pas le cas.

Peut-on encore nier ce génocide aujourd’hui ? Les faits parlent d’eux-mêmes et, aux voix isolées des quelques personnalités qui ont eu le courage de briser l’omerta et de le dénoncer pour ce qu’il est, s’en sont ajoutées de nombreuses autres. Ainsi, le 31 août, l’Association internationale des universitaires spécialistes du génocide (International Association Genocide Scholars) [1] a adopté à une écrasante majorité (86 %) une résolution affirmant que la campagne militaire menée depuis près de deux ans par Israël à Gaza répond à « la définition juridique du génocide ». La résolution ajoute qu’Israël a violé les cinq conditions énoncées dans la Convention des Nations unies sur le génocide de 19482, tout en précisant que la violation d’une seule condition suffit pour qualifier ces actes de génocide.

Les mobilisations citoyennes qui se multiplient de par le monde ont joué et continuent de jouer un rôle de premier plan dans cette évolution, à laquelle s’ajoutent les déclarations ou les mesures prises par un certain nombre de pays. S’il faut les saluer, force est de constater que la plupart d’entre elles en restent, du moins pour ce qui en a été rendu public, au niveau symbolique ou rhétorique. A ce jour, seuls cinq pays sont passés à l’action par des mesures concrètes : l’Irlande, en juin 2025 [2], la Slovénie [3], la Turquie [4], la Belgique [5] et, tout dernièrement, l’Espagne [6].

Bien sûr, la reconnaissance de l’État de Palestine annoncée par plusieurs pays (dont la France), à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, du 9 au 23 septembre, jouera un rôle crucial, comme l’illustre par la négative la réaction israélienne vis-à-vis de notre pays. Aujourd’hui, sur les 193 Etats membres de l’ONU, 148 reconnaissent la Palestine, dont 9 l’ont fait en 2024. En dépit de cela, les décisions de l’ONU en faveur de celle-ci se heurtent au blocage systématique des Etats-Unis, puissance engagée dans le soutien politique, financier et logistique du génocide.

Mais à l’heure où l’urgence est de sauver la vie de deux millions de personnes, cela même ne suffira pas, tant il est évident que seule une action coercitive peut, désormais, avoir un effet. C’est pourquoi l’ONU doit avoir recours à la résolution 377 (V), connue sous le nom de Uniting for Peace (Union pour le maintien de la paix) [7].

Cette force de protection pourrait alors, à l’invitation de la Palestine, entrer à Gaza pour fournir à la population l’aide humanitaire d’urgence dont elle a besoin. Dans le cas où Israël attaquerait la force de protection de l’ONU, celle-ci serait autorisée à se défendre et à défendre les Gazaouis. S’il est légitime de se demander quelle serait la réaction américaine et si les Etats-Unis iraient jusqu’à l’affrontement, dans leur soutien au régime criminel de Netanyahou, l’application de la résolution « Union pour le maintien de la paix », appuyée par une mobilisation internationale, permettra de renverser la situation sur le terrain. Sachant qu’avec l’engagement des pays qui constituent désormais la majorité mondiale en faveur d’un ordre international plus juste et respectueux du droit [8], la donne se trouve changée au niveau mondial.

Ce mécanisme prévoit que dans le cas où le Conseil de sécurité se trouve dans une impasse, le pouvoir d’agir est transféré à l’Assemblée générale. Après une session du Conseil de sécurité et le veto quasi inévitable des États-Unis, la question est alors soumise à l’Assemblée générale des Nations unies. Celle-ci peut alors, à la majorité des deux tiers et sans droit de veto (des États-Unis, en l’occurrence), autoriser le déploiement d’une force de protection en réponse à une demande urgente de l’État de Palestine. Elle peut recommander l’arrêt des livraisons d’armes, des soutiens financiers et des échanges avec l’État d’Israël, son gouvernement se trouvant ainsi mis officiellement au ban des nations.

D’autre part, à l’exemple de la mesure prise contre l’Afrique du Sud pendant l’apartheid, l’Assemblée générale des Nations unies doit immédiatement suspendre Israël de toute participation à ses travaux aussi longtemps que se poursuivent le génocide à Gaza et la politique de colonisation illégale dans les territoires occupés.

La communauté civile internationale a largement témoigné de son dégoût face au sadisme qu’exhibe sans scrupule l’État d’Israël, ainsi que de son opposition inébranlable au génocide en cours. Les institutions, nationales ou internationales, doivent enfin sortir de leur attentisme et se saisir des outils dont elles disposent pour rétablir à la face du monde un ordre de droit, de justice et de sécurité, pour tous.

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