Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la Palestine, est non seulement une femme d’un grand courage, elle est l’une des très rares personnalités à agir sans relâche et avec détermination pour exposer dans toutes ses composantes le génocide à Gaza.
Qu’il suffise de rappeler la publication de son dernier rapport dont le titre est on ne peut plus éloquant : De l’économie d’occupation à l’économie de guerre car, oui, le génocide à Gaza est aussi une affaire de gros sous. Et toute honte bue, les dirigeants occidentaux (mais aussi arabes qui laissent se commettre cette horreur à leurs portes, avec en tête des calculs sordides), laissent faire en promettant, dans des propos aussi graves que vains, une reconnaissance de la Palestine dont on se demande bien ce qu’il y aura à reconnaitre autre qu’un vaste cimetière comme dénonçaient récemment Elie Barnavie et Vincent Lemire dans un tribune du journal Le Monde.
Pour revenir à Francesca Albanese, elle s’exprimait le 13 août sur la chaîne de télévision italienne La7 dans l’émission « In Onda ». Elle y soulignait combien il est erroné de dire que la communauté internationale, en tant que communauté d’États, était dans une paralysie choquante face à l’action criminelle de Netanyahou contre Gaza. En fait, « Nous disons cela et le voyons ainsi grâce à la vision eurocentrique que nous continuons d’avoir du monde », en ajoutant que, « en réalité, il existe des pays dans l’hémisphère sud, en Amérique latine, en Afrique et en Asie, qui ne sont plus les États qu’ils étaient au moment de la décolonisation, il y a 50 ou 60 ans. Ils s’opposent à Israël et ont commencé à imposer des sanctions et à couper l’accès aux ressources naturelles.
« Cela reflète également une profonde indignation parmi de très nombreux citoyens ordinaires qui protestent et commencent à exprimer leurs griefs légitimes contre leurs gouvernements respectifs. En d’autres termes, nous vivons une révolution sans nous en rendre compte. »
Plus loin, elle s’étonne comment « le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, recherché par la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre, au lieu d’être arrêté, ce dont nous devrions parler, parvienne encore à décider de ce dont nous devons parler. » Il est effectivement intriguant que la « communauté internationale » par ailleurs pointilleuse sur le contrôle de la parole, lorsqu’il s’agit de voix critiques, laisse un criminel de guerre décider du narratif. D’une certaine manière « Il y a quelque chose de brillant dans tout cela, car nous discutons des idées folles qu’il propage. Les idées folles qu’il propage (…) sont tellement hors de toute légalité que je me demande comment il est possible que nous en discutions. Ne parlez pas d’exode : ce dont nous parlons, c’est du déplacement forcé de 2 millions de personnes qui ont le droit – un droit sacro-saint – à l’autodétermination, dans le peu qui reste de leur droit reconnu à un État indépendant.
« Nous ne pouvons pas parler de Gaza comme d’une entité distincte du reste de la Palestine occupée, car ces trois entités – Jérusalem-Est, la Cisjordanie et la bande de Gaza – font partie du territoire dont Israël, conformément à la décision de la Cour internationale de justice, doit retirer ses troupes, ses colonies et toute forme de contrôle, indemniser les Palestiniens pour 57 ans de violations du droit international et de crimes, et rapatrier le million de Palestiniens qui ont été déplacés entre-temps. »
On imagine les hurlements en réponse à ces propos ! Or, cherchez l’erreur, il s’agit simplement d’appliquer le droit et les décisions prises dans le cadre de celui-ci…
Autre point crucial, Albanese a averti que l’appel à la reconnaissance d’un État palestinien ne devait pas détourner l’attention de l’urgence des mesures à prendre pour mettre fin au génocide en cours, dans une interview accordée au Guardian le 13 août.

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